mercredi 29 mai 2013

Le petit pan de mur jaune

On le dit souvent mais pas assez : les cartes postales sont aussi des documents.
Il arrive en effet que pour être certain de ce que l'on croit être sa ville, se pencher avec attention sur des photographies populaires permet bien de trouver l'affirmation ou l'étonnement d'une réponse.
Il en est ainsi de Royan et de ses couleurs.
Les cartes postales ont enregistré les couleurs même si, attention, parfois, il ne faut pas oublier que la fabrication des cartes conduisait certains éditeurs à ajouter de manière fantaisiste à grands (tout petits en fait) coups de pochoirs, des taches de couleurs sur des images en noir et blanc.
Mais quand même...
On peut très bien et souvent se régaler des notations colorées sur nos cartes postales et sur les constructions modernistes de la plus Belle Ville du Monde : Royan.
Admirons donc tous ses pans de couleurs : rouge, jaune, bleu.
C'est chatoyant, c'est Royan !
On notera que la Ville dans son très beau sursaut patrimonial a édité un petit guide fort pratique pour que les habitants puissent lors des ravalements retrouver les belles couleurs de leur ville.
A vos pinceaux, à vos rouleaux Royannais Chanceux, faites péter la couleur moderne dans votre ville !
On regarde ?






D'abord deux cartes postales dont le point de vue est particulièrement intéressant puisque pris depuis le toit du Casino disparu. Et ce n'est pas par provocation que je commence cet article sur la couleur par une image en noir et blanc mais bien pour montrer comment la réception de la ville change avec le passage de la couleur ! Et puis... c'est surtout un point de vue très rare sur notre ville.
La carte postale de Mr Chatagneau, éditeur, nous montre donc la ville depuis les terrasses du Casino. Elle est datée de 1963.
Et voici, un peu plus à gauche la couleur !

 




Cette édition Arum nous montre bien le rouge du front de mer, le jaune de l'immeuble au loin, le bleu sur une partie de ce qui est aujourd'hui La Siesta et le jeu de rectangles colorés sur le Casino.
Et sur cet hôtel ?



L'Hôtel des Girondins affiche fièrement ses pans de murs bleus en alternance avec ses stores jaunes. Le jeu des ombres complète les alternances. On remarque aussi le choix de la fonte Banco de Roger Excoffon !



Les amateurs d'automobiles se réjouiront des DS et GS Citroën mais je m'étonne de la présence d'un concessionnaire Datsun à Royan, marque automobile bien rare à l'époque. Il s'agit d'une carte postale promotionnelle de l'hôtel du toujours prolifique Mr Chatagneau.
Pour finir aujourd'hui, ce point de vue très rare sur notre ville :



La carte postale des éditions Arum nous montre le Cours de l'Europe et la Tache Verte. On voit au loin le château d'eau et le bus vient de passer devant la gare routière aujourd'hui Galerie Louis Simon. Cela réveille de beaux souvenirs...
Mais mon cœur fait un bond en voyant la couleur rouge un rien passé au-dessus du libre-service. On remarque aussi que la couleur arrive par la peinture certes mais que les stores de toile formaient également un corpus coloré dont il ne faudrait pas oublier l'importance. Leur couleurs flamboyantes donnaient à la fois la joie et aussi l'ombre brisant le soleil généreux.

 

Il faudra, et je l'ai déjà dit, trouver un jeune étudiant voulant bien nous faire ici à Royan ou ailleurs, l'histoire de cet élément décoratif et utile dans l'architecture des Trente Glorieuses.
Car le store de toile fut souvent utilisé dans ses alternances de couleurs comme un élément plastique de cette modernité.
Alors qui s'en occupe ? Oui... je vois au fond de la salle une main se lever... Merci.
Cette dernière carte postale possède un ça étonnant : sur la chaussée des inscriptions et des croix de Lorraine gaulliste sont peintes et demandent de voter pour Lipkowski.
S'il s'agit bien du maire Lipkowski on ne pourra que regretter cette élection. C'est bien ce maire qui fit détruire une grande partie de ce Royan que nous aimons aujourd'hui... cela permet de se situer vers 1965.





mardi 28 mai 2013

Mexico, Mexiiiiicoooo

On sait bien l'influence de l'architecture brésilienne sur une ville comme Royan.
Souvent cela permet de parler de l'Amérique Latine et de sa vitalité.
Parlons aujourd'hui de l'autre pays riche en modernité architecturale : le Mexique.
Ce pays avait connu dans les années 50 et 60 un véritable engouement en France et sans doute que les liaisons aériennes n'y sont pas étrangères...
On trouve facilement dans les boîtes à chaussures des cartes postales du Mexique alors que le Pérou ou même le Brésil sont plus rares. C'est l'histoire du tourisme qu'il faudrait analyser.
Nous regarderons bien mieux les belles images de nos cartes postales qui nées sous le soleil de Mexico connaissent aujourd'hui la fraîcheur humide de la Normandie.
On commence ?



Alors ?
Ce beau volume aveugle juste fendu sur son horizontale est la chambre des députés et du gouvernement à Mexico.
On comprend comment en dissociant les fonctions et en les construisant chacune dans une forme d'autonomie associée, l'architecte Joaquin Alvarez Ordonez a réalisé ce projet. Le volume aveugle du premier plan doit sans doute contenir la chambre des députés et ses gradins.





Le bâtiment à l'arrière plan a bien compris la leçon moderniste. Toit terrasse occupé, pilotis, dégagement des volumes qui offrent depuis l'extérieur la lecture de leur fonction. Une machine à gouverner mais aussi une machine de démonstration politique. Le décor est plaqué sur la façade offrant une polychromie que depuis cette image nous ne faisons que deviner.
La carte postale est une édition Diaz Massa non datée.
A Mexico nous pourrions dormir ici :



L'Hôtel de Mexico est une sorte de prototype de l'hôtel international. Une grande barre haute un rien clinquante dont la jonction au sol se fait par un centre commercial et une dalle. Un monstre.
Sur le toit, un volume abritera un restaurant ou tout autre activités jouant sur la vue panoramique. Il a de l'allure cet hôtel. Il fait un peu peur, sans doute ici trop marqué par une teinte grise métallique et brillante qui lui donne une allure technique et mécanique. Une sorte d'esthétique de la cage d'ascenseur, tous boyaux dehors.
Au pied on devine pourtant une œuvre majeure de l'architecture de Mexico, le poliforum (ou polyforum) par Siqueiros le peintre et G. Rossell l'architecte, dont la carte postale ne permet pas de deviner les qualités.



On trouve dans Architecture d'Aujourd'hui  de 1972 un article sur cette construction dont les images en noir et blanc offrent une vision... étonnante !
L'article à l'articulation politique ne laisse aucun doute sur les utopies urbaines et peut, soit être considéré comme bien éteinte aujourd'hui ou au contraire un programme à appliquer d'urgence. On pourra s'amuser du collage entre ce désir et la réalité d'un hôtel de classe internationale devenu un World Trade Center.











lundi 27 mai 2013

Grises grilles

Je vais faire jouer ensemble deux grilles modernes qui n'ont pas grand-chose à voir ensemble sinon leur proximité historique.
J'aime les grilles. Certainement que mon goût pour l'architecture des Trente Glorieuses tient à ce jeu plastique qui a fait les joies de cette période où, comme une expérience Néo-Plasticienne, les architectes sous l'influence des angles droits ont usé des tire-lignes.
Une sorte de drogue douce.
Certaines de ces grilles sont le résultat d'un vrai travail d'architecture, c'est-à-dire qu'elles sont la projection extérieure d'une réflexion sur le plan et l'élévation. D'autres, parfois plus abstraites, plus détachées d'une nécessité constructive, apparaissent bien comme une esthétique moderne.
Ce qu'il y a de bien c'est que le noir et blanc de la photographie fait monter le dessin allant même, par l'annulation des couleurs, jusqu'à affirmer son importance au risque sans doute de passer à côté de la vraie peau des bâtiments.
C'est le cas ici :



La Cité Radieuse à Rezé de Le Corbusier dans ce beau gris généreux et placide, recevant de plein fouet la lumière comme pour affirmer davantage son orientation volontaire est un exemple parfait de ces grilles orthogonales qui vibrent d'un cinétisme que le cheminement du regardeur fait mouvantes, joueuses. Cette grille accuse aussi ces fuyantes que trop souvent les photographes tentent de rattraper à grands coups de correction par la chambre photographique souvent sous l'influence des architectes eux-même surpris qu'ils furent que les belles parallèles finissent toujours par se rencontrer en un point. L'écart entre la vision à plat sur la planche à dessin et le volume prenant l'espace ainsi que le regard réel du visiteur qui ne se place jamais à l'exact du milieu de cette grille apparaissent alors comme des moteurs visuels ordonnant bien autrement cette modernité. Les lignes fuient et s'accelèrent.
Et, il y a peu de Le Corbusier qui aient saisi cela et qui offrent à cette déformation l'occasion de s'exprimer en jouant avec une rhétorique colorée dans les alcôves qui confinent parfois à un bavardage plastique. On s'amuse bien au pied des Cités Radieuses de ces jeux de carrés de couleur devenant des triangles apparaissant, disparaissant au gré du regard glissant sur, puis sous la façade. C'est beau.




Mais cette carte postale Artaud met surtout la grille moderne de Corbu en regard avec le végétal. Comme une ligne de combattants, les arbres sont posés, installés devant la grille et jouent avec, s'y opposent. Et si cela vient bien de l'histoire de l'esthétique de la carte postale, le premier plan végétal adoucissant alors la dureté de l'architecture et la replaçant dans un paysage au romantisme usé, il n'est pas non plus stupide d'y voir aussi finalement un vrai attachement à la pensée de Le Corbusier voulant que son architecture soit justement dans son opposition dure avec la nature la preuve de son attachement. Le photographe aurait bien pu se placer de face, il en avait le recul. Il a choisi de le faire fuir à l'infini offrant aussi son épaisseur. Le photographe de cartes postales ne se met pas là par hasard, excusez-moi Mesdames et Messieurs les photographes contemporains, IL COMPOSE. C'est dire qu'il regarde, cherche, invente et surtout aussi d'une certaine manière porte une attention.
Cela se fait en 1957.

Si Bernd et Hilla Becher étaient passés à Montbéliard auraient-ils fait cette photographie ?



Au-dessus du lycée technique nationalisé de garçons par Pierre Lauga, architecte, les deux photographes allemands auraient sans doute choisi aussi ce ciel gris et étale comme un papier teinté. Il s'agit de nier la nature mouvante du ciel au profit d'une valeur de ton. Cette négation parfaite de la météorologie démontre comment leur objectivité est née d'un rapport à la représentation et non au réel.
Le photographe de cette carte postale C. A. P semble avoir voulu jouer la même chose à moins, oui, que ce ne soit nos photographes allemands qui aient reçu la leçon de cette photographie populaire. Car que veut le photographe anonyme de carte postale ? Que veut-il offrir au regard des acheteurs si ce n'est une reconnaissance parfaite du lieu, une reconnaissance immédiate dégagée absolument des anecdotes de l'instantanéité ?
Ici c'est bien le lycée qui est photographié et non le moment de sa photographie. La froideur du noir et blanc, (sa netteté serait plus juste), permet bien cette pérennité fascinante de sa réalité. Et, si on revient sur sa grille, on la lit ici parfaitement parce que le choix photographique le met totalement en avant. De très haut et de la gauche, la lumière dessine avec très peu d'ombres, les lignes de ce beau dessin qui évoque une France sérieuse à la Perret. La sévérité classique que finalement la rotondité du cylindre adoucit un rien devait bien dire la discipline républicaine appliquée à la petite troupe des garçons en apprentissage !
L'architecture parle ici d'ordre, de surface, de hiérarchie. Le travail avec le sol semble particulièrement bien étudié. Toutes les lignes du dessin sont affirmées par une petite épaisseur, un jeu de refends, une légère exagération et une opposition de surfaces. Le lisse travaille contre le rugueux.
Pierre (?) Lauga l'architecte ne semble pas avoir comme Le Corbusier besoin de la couleur. Pour quoi faire ? Le soleil a sans doute plus de travail à faire ici pour faire vibrer l'ordre de la façade. C'est beau aussi l'abandon d'une forme à sa lumière.
Et, pour conclure sur le gris des grilles modernistes, les photographes de ces cartes postales pourraient sans doute avoir affirmé avec Le Corbusier que :
"La photographie de cartes postales est le jeu, savant, correct et magnifique des volumes sous la lumière."
Oui.

 

dimanche 26 mai 2013

Mon Paris, mon goût, ma joie

Il existe dans la capitale un lieu qui concentre à lui seul tous mes désirs d'espaces, tous mes brutalismes chatoyants, toutes mes images urbaines.
Ce lieu est celui-ci :



D'abord, par ordre historique le très beau Palais Omnisport de Messieurs Andrault et Parat dont un Vauban engazonné aurait pu chanter les louanges de son génie constructif, de son volume aveuglé, de sa robustesse tranquille.
Lui faisant face, l'œuvre majeure de Monsieur Chemetov, celle qui me le fit aimer : le Ministère des Finances. Le mur part de la ville, se jette comme un suicidé en attente dans la Seine. Puissant lui aussi comme une fortification, disant sans retour le sérieux de la fonction qui ne l'agite pas, ce bâtiment est d'une richesse formelle absolument superbe.
Ici, on ne fait pas joujou avec des machins, des bidules, du design.
Ici on construit.
Et Paris sait faire ainsi se regarder deux constructions, deux fonctions. Et le piéton face à ces formes et ces espaces sait bien que l'architecture prend son corps. Que, dans la cacophonie de la ville, collage parfois misérable mais précieux, il est nécessaire que la Force parle.
Que les volumes lui interdisent le confus et lui donnent en place et lieu, la construction.
Je chanterai toujours cette dureté qui fait exister, celle qui dit mon effort à saisir le monde.
Ce monde est un dessin né d'une pensée.
J'irai souvent à Bercy.
J'irai souvent vous voir.
J'aimerais savoir comment au sens propre comme au sens figuré ces deux architectures ont appris à dialoguer. Est-ce l'indifférence de l'un à l'autre qui fait l'intérêt de leur monologue ?
La carte postale est une édition Chantal. la photographie est du service photo du Minitère de l'Economie et des Finances et du Budget et elle est datée de 1989.
Elle nomme bien Paul Chemetov et B. Huidobro comme architectes mais ne nomme pas Messieurs Andrault et Parat pour le Palais Omnisport de Bercy.
Et si vous voulez savoir comment on tond la pelouse sur une fonction oblique...







mercredi 22 mai 2013

Le Couteur à Alger

Parce qu'en ce moment, avec les étudiants de deuxième année Design du Mans, nous travaillons sur la barre "Le Couteur", je vous propose, (je leur propose...) de regarder une autre construction de cet architecte moderniste.
La Cathédrale d'Alger :



Cette très belle carte postale en couleur au ciel bleu comme il se doit nous vient donc d'Alger et nous propose un beau point de vue, très proche et resserré sur la Cathédrale dessinée par Jean Le Couteur et Paul Herbé. Depuis cette image, nous pouvons sans difficulté admirer le jeu subtil et complexe des courbes et contre-courbes de cet étonnant bâtiment qui est une ode au béton. La carte postale sans nom d'éditeur fut expédiée en 1974.
On trouve dans la revue Architecture d'Aujourd'hui n° 99 un article qui met en valeur cette construction sur quatre pages ! Je n'aurai donc rien à ajouter. Il faut dire que la complexité constructive est réelle et utile et que, au-delà d'une sorte de chef-d'œuvre technique, il s'agit bien d'une vraie sculpture habitée par une fonction. On notera la présence de René Sarger comme ingénieur.
Les photographies savent magnifier cette Cathédrale et celle du coffrage des piliers est digne d'une photographie de Rodtchenko !



























mardi 21 mai 2013

Le Corbusier, la passion des cartes

En ce moment a lieu au CIVA de Bruxelles une exposition passionnante en deux volets sur les rapports entre la photographie et l'œuvre de Le Corbusier.
Il me fallait y faire un tour d'autant plus qu'une exposition dans l'exposition est consacrée à la collection de cartes postales de l'architecte...
Luis Burriel Bielza est un inventeur comme on dit souvent pour les trésors. Il a mis à la lumière du jour ce fonds d'archives de la Fondation Le Corbusier et il a décidé d'en tirer un parti fort intéressant du point de vue de l'analyse entre image, représentation et œuvre.
Il y a là un travail remarquable permettant en effet de comprendre les jeux de correspondances, d'écarts, et de kaléidoscope mental de Le Corbusier vis-à-vis d'un matériau populaire, d'un média qui connut une expansion contemporaine de la vie de l'architecte.
Les cartes postales apparaissent tour à tour comme document photographique se mettant en lieu et place de photographies qu'aurait pu prendre l'architecte, révélant parfois des points de vue spécieux, servant de base à des dessins futurs, ou même servant en quelque sorte de carnets de notes imagés.
Les corrélations ainsi établies par Luis Burriel Bielza entre les carnets de voyages si célèbres de l'architecte et ses cartes postales sont bien sidérantes. L'analyse de ces rapprochements, des réminiscences de modèles dans l'œuvre construite ou écrite de l'architecte est parfaite et l'auteur nous emmène dans son enquête avec beaucoup de lucidité. Il est évident qu'il tient là un filon inédit.
Pourtant...
Alors même que cette exposition a lieu dans le cadre d'une autre qui situe le rapport de le Corbusier à l'image photographique, il semble que la carte postale soit trop peu analysée pour elle-même en tant qu'objet photographique possédant à son tour un auteur, un éditeur et un photographe. Elle sert un peu d'écran de projection à la relation de Le Corbusier aux images ne mettant pas en question la fabrique du cliché du lieu ou son rapport à l'histoire du pittoresque, à l'invention par l'image de ce qu'il faut voir. Pourtant le dernier chapitre du catalogue permet bien de comprendre l'exigence formelle et éditrice de l'architecte pour les images produites de son œuvre. Ce désir de maîtrise ne semble pas être passé sur les images des architectures et des lieux n'appartenant pas à Le Corbusier comme si, finalement, ce dernier comme un touriste prenait les cartes postales (et leur représentation) comme formes définitives de ce qu'il faut voir d'un lieu.
Et c'est bien aussi ce qui est beau. Le Corbuiser en se laissant prendre en quelque sorte par la profusion magique des cartes postales, leur infini possible d'un lieu et leur capacité à montrer même le très resserré champ d'un réel minuscule ou folklorique dit très bien la qualité très grande de ce média qui n'est pas populaire parce qu'il est pauvre mais parce qu'il est riche d'une attention objective, onirique, folklorique et même graveleuse...
Pourquoi faire comme s'il n'existait qu'un seul type de carte postale ? Car voir les seins dénudés dans un orientalisme de bazar des femmes d'Alger n'a pas grand chose à voir avec le mur effondré du Forum de Rome même si cela est imprimé sur un carton de 10 par 15.
Comment oublier également que Lucien Hervé présent dans l'exposition fut également un photographe de cartes postales pour Ronchamp ? Comment ne jamais nommer les photographes des cartes postales des éditeurs et ne rien analyser de leur influence ou de leur formation ? Charles Bueb est à nouveau ignoré. Croire que seuls l'acceptation ou le refus de Le Corbusier d'une photographie pour une édition en carte postale ne peut pas suffire à analyser la naissance du modèle que deviendra son œuvre. Il fut, comme le séchoir à café représenté dans sa collection, lui aussi dirigé par des points de vue non-maîtrisés. Et tout tient dans cette liberté géniale et infinie des cartes postales.
Comme d'autres architectes, Le Corbusier a aimé les images d'architectures au moins autant que les architectures. Et sa difficulté à en être son propre photographe a produit chez lui une forme sans doute d'irritation. Car la mécanique de la peinture qu'il a pourtant défendue avec Ozenfant semble ne pas pouvoir rencontrer la mécanique de la photographie.
Il y a donc bien une grandeur cultivée du photographe de cartes postales que Le Corbusier n'aurait pas réussi à atteindre. Une innocence humble mais belle qu'il a su aimer, collecter plus que collectionner, organiser et surtout piller. C'est sa force.
J'oserai une petite critique sur la scénographie de l'exposition qui ne rend pas hommage, je trouve, à la grande pertinence du travail de Luis Burriel Bielza. C'est par trop confus, les cartes postales sont brouillées par un plexiglass d'une qualité épouvantable. On passera sur les écrans de télévision qui soit allongent les cartes soit les compressent...
Le catalogue lui ne souffre d'aucun défaut éditorial et d'analyse. C'est un très beau livre, un beau point de vue, une mine sérieuse et aboutie.
Bref... un très beau et passionnant travail. Merci.

Le Corbusier
La passion des cartes.
Luis Burriel Bielza
éditions Mardaga
isbn : 978-2-8047-0169-7

L'exposition à lieu jusqu'au 6 octobre 2013 au CIVA de Bruxelles. Précipitez-vous !
Vous pouvez aussi revoir le chapitre sur Le Corbusier sur le volume 1 de ce blog.

quelques images de l'exposition :

















mercredi 15 mai 2013

Amitiés franco-soviétiques

Je vais mettre dans un même article deux architectures qui, si on en croit les rapprochements formels un peu rapides, pourraient se ressembler.





La première carte postale est située en France, à Nanterre exactement. Il s'agit du collectif de la S. N. C. F . très impressionnant pas son jeu superbe d'alternances en façade et surtout aussi par l'articulation finale du cylindre en pavés de verre de l'escalier. Grandes ouvertures, Balcons profonds (coursives ?) marquage des niveaux fabriquent une architecture bien moderne pour l'époque.
Mais quelle époque au fait ?
1932 ! Si l'on en croit cette page très pratique qui nous donne aussi le nom de l'architecte Henri Pacon qui ne nous est pas inconnu. On apprend en plus que cet immeuble est inscrit à l'inventaire du Patrimoine. On doit notamment à Henri Pacon la gare du Havre que nous avions vue ici. Il faudra sans doute envisager un article sur Henri Pacon qui semble un architecte très prolifique. On retrouve bien l'ensemble sur Google et la sensation spatiale est... très différente !
Mais quittons donc la France pour l' U. R . S . S. et pour Moscou plus particulièrement.
Les cartes postales des constructions soviétiques de cette période sont assez rares, il faut bien l'avouer. De plus, ici, l'alphabet et la langue ne nous permettent pas une identification très aisée et je tente avec des traducteurs de trouver de quoi il s'agit.
Trop peu efficaces, malgré les conseils affûtés de Rose... Cherchons par l'image.
Et voici la réponse... Merci Internet ! Il s'agit de l'Institut textile !
https://fr.wikipedia.org/wiki/Maison_collective_de_l'Institut_textile
Pourtant le seul mot qu'avait réussi à me traduire la machine était le mot... cuir... On pourrait imaginer un truc du genre : Institut national de l'habillement textile et de cuir ?
Une vraie rareté donc que cette carte postale dont je vous donne également le verso.



Les amateurs d'architectures constructivistes iront revoir aussi cet article.
On notera que l'édition de cette carte postale est faite sur un papier très pauvre et qu'elle ne fut pas écrite ni expédiée.

De nos jours...