lundi 18 mars 2024

l'oubli par l'histoire d'un architecte

 Il y a des cartes postales dans ma collection dont je ne sais pas très bien quoi faire. Pourtant elles portent tous les signes nécessaires et c'est pour cela d'ailleurs que je les ai achetées. Mais, après l'enthousiasme de la découverte, je me demande bien par quel biais et pourquoi je devrais les mettre ici, à nouveau dans le registre possible d'une histoire de l'architecture et de sa représentation.
Voilà un exemple :



Oh ! comme j'étais heureux de trouver cette carte postale Iris nous montrant une belle façade moderniste d'un immeuble qui semble si typique de la production de cette époque ! Comme j'étais heureux de trouver cet immeuble bien cadré dans la verdure d'un parc comme pour en adoucir justement la grille de cette belle façade en mur-rideau !
Et, miracle, au dos de la carte postale figure bien le nom de l'architecte : A. Delessert.
Nous sommes donc à Roanne (la marraine d'Elbeuf, ma ville natale !) devant la résidence "Promenades-Beaulieu". Nous sommes en 1978.
J'avais fait des recherches pour trouver l'architecte A. Delessert et les recherches restant vaines, j'ai oublié cette carte postale, oublié cette architecture ne sachant quoi faire d'une telle image. Pourtant, maintenant, je me dit que c'est intéressant cet oubli de l'histoire face à l'intérêt de cette construction au moment de sa création et de cette prise de vue. Mais quoi faire de ce paradoxe ?
Je ne peux vraiment pas dire grand chose de cet architecte et encore moins de cette architecture depuis ce point de vue. Je peux juste dire que nous sommes heureux de penser qu'à une époque cette résidence avait suffisamment d'importance pour faire image de la ville de Roanne. Et puis...plus rien...oublié l'architecte, oubliée sa résidence, son impact dans la ville. 
L'immeuble est toujours là, avec toujours sa superbe grille. Il est juste à coté d'un autre immeuble que nous avions déjà aimé ici :
On pourrait donc penser que les constructions modernes de Roanne avaient trouvé dans la proximité de ce parc tout le loisir d'une expression franche et moderne, faisant monter leurs verticales dans une ville bien ancienne. Élan moderniste !
Google Map nous permet de mieux comprendre d'ailleurs l'intégration de notre immeuble de A. Delessert dans la ville. On note un traitement de rez-de-chaussée comme un socle bien plus brutaliste que le reste de l'immeuble, opposition franche entre les services sur la rue et l'élan des logements de la résidence. C'est bien fait, bien dessiné, presque un archétype du petit immeuble moderne pour maquette de chemin de fer. 
Elle a fière allure cette résidence ! Et la carte postale ne lui rend pas assez hommage finalement en la perdant dans la verdure.
Alors rien ne me permet de rebondir, d'accrocher le nom de l'architecte Delessert à une autre production ni à une école, une filiation. Vous savez comme j'aime rebondir d'une carte postale à une autre.
Mais qu'importe ! Voilà que je mets un tout petit peu de lumière sur Monsieur Delessert. Espérons que ce message trouvera un écho pour le replacer dans l'histoire. Cette réalisation, en tout cas, le mérite.
Je suis certain que quelqu'un viendra ici nous dire toute la place que mérite de retrouver Monsieur Delessert dans l'histoire d'une certaine architecture moderne. 





jeudi 7 mars 2024

Le ciel est parfait



Que pourrais-je dire de plus ?
Et cette question ne se pose pas seulement pour cette carte postale du C.N.I.T mais pour l'ensemble de ce blog. Ce matin, après donc une très longue interruption, en rangeant des cartes postales qui trainaient, je retrouve ces deux cartes postales de ce Palais comme le nomme l'éditeur Leconte et je me dis que, tout de même, je pourrais bien vous les montrer.
D'abord parce que les travaux, les constructions, les chantiers sont assez peu représentés en carte postale. L'impermanence n'est pas l'amie du commerce qui préfère bien plus des images qui resteront toujours d'actualité même après quelques années sur un tourniquet.
Ici, le photographe resté anonyme nous cadre donc le C.N.I.T à un moment bien beau de son chantier. Les trois voûtes sont décoffrées, toutes fraiches, mais les pans de verre ne sont pas encore posées, ce qui laisse le vide passer encore au travers.
On note avec étonnement qu'un S.I.C.O.B y est déjà installé ! Ce qui explique le nombre d'automobiles garées. Cela devait être bien étrange de venir ici, sous de telles voûtes, venir voir un salon et cela devait être aussi bien spectaculaire !
Comme j'aurais aimé voir ça et faire plein de photographies en stéréoscopie avec mon boitier Richard F40 !
Avec mon compte-fil, je trouve des pancartes bien intéressantes qui nous donnent le noms de quelques entreprises : Baudet, Donon, Roussel pour les constructions métalliques et Coignet, on imagine pour la structure béton.
La photographie est superbe. Le ciel tout particulièrement.
On regrette qu'aujourd'hui ce beau bâtiment, sans doute l'un des plus beaux et audacieux de l'époque en France, soit aujourd'hui littéralement écrasé sous la dalle de La Défense. Et, malgré mon vertige, j'aurai peut-être eu l'audace de monter sur les échelles pour visiter les collines de béton et voir Paris depuis leur sommet. Enfin...je rêve...
J'aurai aussi aimer faire la visite avec Jean-Michel Lestrade qui aurait pu m'indiquer les particularités techniques.
Réjouissons-nous alors de la présence des images et des voyages qu'elles nous offrent.

Quelques mois plus tard, les éditions Raymon ont pu faire ce cliché et éditer cette carte postale :


Tout est en place. Tout est achevé. Et la coquille de béton immense s'amuse à s'étirer sous la présence des coquilles St Jacques de la station-service Shell. On aime les deux coquillages.

Pour revoir La Défense et le C.N.I.T en particulier :

etc....

mercredi 31 janvier 2024

Royan, Henri, un architecte du Front de Mer




 
Dans ma boite aux lettres ce matin, je reçois donc une petite lettre et deux photographies d'un monsieur penché sur des plans d'architecture. L'ensemble me fut vendu comme provenant de Henri Bertrand, mais le courrier n'est signé que Henri. Certes, le courrier fait bien référence à la Reconstruction de Royan et c'est même cette adresse qui est donnée en fin de courrier mais l'auteur ne semble pas architecte et d'ailleurs s'en amuse en écrivant à ses parents. Je vous laisse lire.
Comment donc pouvoir vraiment identifier ce document et retrouver le nom de son auteur puis pouvoir enfin identifier le monsieur penché sur ces plans qui seraient donc bien ceux de Royan ?
Vous imaginez mon trouble...
On trouve bien un "bâtisseur" du nom de Henri Bertrand qui aurait travaillé aux Sables-d'Olonne mais la date de naissance me laisse perplexe au regard des photographies :

En effet, si c'est bien ce Henri Bertrand, né en 1891, cela lui donnerait sur les photographies juste après guerre plus de 50 ans...je n'y crois pas. Ce visage est bien plus juvénile et le contenu du courrier ne confirme pas que c'est là la correspondance d'un homme de cet âge.
Par contre, je trouve dans le témoignage passionnant de Monique Canellas-Zimmer sur la construction de la maquette de la Reconstruction de Royan le nom d'un Bertrand venu aider ! Il pourrait bien s'agir de mon mystérieux Henri ! Sans aucun doute.



Alors ?
Qui pour identifier ce jeune homme dessinant des plans ? Peut-être que les photos ne montrent pas Henri mais un camarade de travail de celui-ci...
On note donc que ce Henri n'est pas architecte, qu'il évoque le rendu de la maquette pour la venu du Ministre, ce qui devrait permettre de dater le document facilement. Il est aussi question de St Germain mais lequel ?

Dès que nous aurons identifié ce courrier, son auteur et bien entendu les photographies, nous verserons ces documents au Musée de Royan. Ce sera sa juste place.

En attendant, faites un tour ici, c'est passionnant : https://www.c-royan.com


Mercredi,

Chers Parents,
Je m'étonne de ne pas avoir encore reçu de lettre de vous cette semaine, il est vrai que Jacqueline me donne souvent des nouvelles.
Mon travail marche bien, je m'y suis mis très vite et il m'intéresse. D'ailleurs, je crois que les patrons sont contents de moi, je leur fignole comme à mon habitude. Les architectes me parlent comme si j'étais du métier, j'écoute les explications comme si je comprenais, ensuite j'étudie la question et me défend comme je peux, tout seul. Tous mes compagnons sont sympas, il règne une bonne atmosphère de camaraderie, je suis très libre et je peux m'absenter si j'ai une course à faire. En ce moment il y a beaucoup de travail, il faut finir la maquette fin octobre car le ministre de la reconstruction doit venir la voir, on va s'amuser. Question chambre, je suis toujours à l'hôtel, je me suis renseigné les chambres sont assez chères par ici 5 ou 6000 fr par mois. Au restaurant, je mange très bien et ce n'est pas tellement cher 250fr le repas vin à volonté, et il est à coté de mon travail.
Donnez-moi de vos nouvelles de St Germain. Avez-vous passé une bonne journée dimanche et j'espère vous vous entendez bien avec Jacqueline. je commence à me faire à ma nouvelle vie, je prends des habitudes, mais je ne sors pas beaucoup, où voulez-vous que j'aille tout seul. D'ailleurs le pays n'est pas très drôle. En ce moment, il pleut assez souvent, mais il fait assez chaud.
En espérant vous lire bientôt je vous quitte et vous embrasse bien affectueusement.
Henri.
Agence des Architectes, Front de Mer, Royan, Charente Maritime





lundi 29 janvier 2024

Libreville, libre à vous

 C'est toujours spectaculaire ce genre architectural, genre qu'on pourrait appeler baroque-moderne ou syndrome Brasilia. Je veux dire des gestes dans le dessin voulant affirmer une originalité et un désir d'image du bâtiment bien avant son fonctionnalisme, disons simplement son rôle.

Comme disaient les Venturi : "i am a monument."

Ce geste formaliste, tout en évidence de spectacle, on le trouve souvent dans des espaces voulant rattraper en quelque sorte trop rapidement leur retard moderne ou voulant afficher de manière trop évidente leur jeunesse, leur adhésion au Monde Moderne.
Faut que ça pète !
Alors, devant ce genre architectural souvent maladroit, trop marqué, on peut sourire assez vite en  raillant l'impression d'une architecture de bande dessinée de science-fiction, d'un caractère fictionnel évident : c'est osé.
C'est vrai que ce morceau est tout inscrit dans cette veine. On hésite entre une agence de pacotille voulant imiter un décor pour James Bond ou un Futuropolis arrogant rempli de machins tarabiscotés pour valider le Futur qui se doit de ne pas être normal et donc spectaculaire.
Quelque chose donc de surjoué dans l'étrange, faut épater le badeau ou le responsable politique qui veut que l'on se rappelle être passés là.
La vache ! C'est moderne ici !



Nous sommes donc à Libreville au Gabon devant la Tour de l'Immeuble du 2 décembre grâce à une très belle carte postale dont la photographie est de J. Trolez que nous connaissons sur ce blog pour une exceptionnelle et magnifique carte postale qui reste l'une de mes préférées de ma collection :
J. Trolez, ici, cadre un détail dont on pourrait croire, depuis ce point de vue, qu'il est le tout. On devine que c'est bien alors ce morceau qui fait l'événement architectural du bâtiment, qui en donne sa quintessence moderne.
L'effet tient de la ziggourat, de la base de fusée gràce aux empennages, du détail d'une pièce mécanique d'un presse-agrume électrique. Ce qui fait exotique c'est bien entendu, ici, le champ coloré avec un dégradé de Terre de Sienne un peu trop rose pour être honnête. On passera sur le contraste entre les huisseries des fenêtres avec effet miroir (trop top !) et la maigreur des morceaux de béton, minces comme des découpes de balsa d'une maquette promotionnelle.
Sur cette carte postale, l'architecte est nommé : GAU. Je ne trouve rien de très clair sur cet architecte ou sur ce qui ressemble plus à une agence. On trouve bien une agence GAU à Montpellier mais j'ai du mal à croire en un lien entre cette production et celle de cette agence. Qui aurait un éclaircissement à faire ?


Sur cette autre carte postale, toujours de J. Trolez, on recule un peu pour mieux comprendre le bâtiment et comprendre sa forme globale. On devine aussi le travail de couleur ainsi qu' une sorte de soucoupe volante venant se poser derrière la tour. Difficile donc de comprendre cet ensemble qui semble pourtant conséquent. La vue satellitaire est plus utile. Malheureusement, nous ne pouvons pas depuis Google Map en faire le tour.
Doit-on donc s'amuser, se moquer de ce type d'architecture ? Ne doit-on pas justement en aimer la presque naïveté moderne, le surjeu plastique, la volonté d'existence comme une cagole trop maquillée ?
Car si on aime les projections en carton de l'artiste Bodys Isek Kingelez, espace de jeu et de rêves, il est plus difficile de comprendre le besoin d'inscrire ce genre de décor dans le réel et donc dans l'usage. Peut-être que la volonté de surtout faire image sera ce qui peut sauver ce genre. Il y a, en tout cas, pour moi, très peu de chance pour que j'aie à éprouver mes yeux face à face avec cette architecture. Alors, derrière sa photographie, je peux bien vivre mon rêve et mes projections comme je veux. Libre à vous d'en faire de même ou de faire le voyage !
Et qui aurait les archives de Monsieur Trolez ?
Pour revoir un autre exemple en Afrique de ce type un peu (beaucoup) raté : https://archipostalecarte.blogspot.com/2020/11/le-cas-cacoub.html






mardi 16 janvier 2024

Espérons un Dati Show du Patrimoine !

 J'ai hésité à faire une lettre ouverte à Madame Dati suite à son arrivée au Ministère de la Culture qui semble (bien avant même qu'elle ait décidé quelque chose pour la Culture) soulever des inquiétudes de la part du petit monde culturel.

Pour ma part, je ne tire pas sur une ambulance surtout quand elle n'a pas encore ni démarré ni même allumé sa sirène ! J'attends de voir...Ce dont je suis certain c'est qu'il n'y a rien à regretter et que la claque venue applaudir la partante au sourire forcé et au tutoiement gêné face à Madame Dati pendant la passation de pouvoir n'y changera rien...

Adieu donc Madame Abdul-Malak ! Espérons que vous partez avec votre équipe et surtout avec celle en charge du Patrimoine. Au vu de leur, de votre bilan, je pense qu'il est mieux de passer la main. Si, par malheur, cette escouade devait rester en place, il faudra que Madame Dati éprouve cette vieille équipe à l'aune de sa demande d'une culture ouverte et populaire comme elle l'a déclaré dans sa prise de fonction. 

Justement, ce qui a manqué dans le traitement de la Culture chez Madame Abdul-Malak c'est bien d'avoir accordé à ceux qui produisent de l'Art ou qui signalent du Patrimoine une confiance populaire, d'y avoir vu une conscience vivante de ce Patrimoine. Ici, je n'évoquerai pas le traitement honteux dont les écoles d'Art ont été les victimes pendant le siège de Madame Abdul-Malak au Ministère qui a répondu à la détresse de nos écoles par une obole minable jetée de loin dans une escarcelle déjà bien vide d'argent et de projets. Combien d'écoles d'Art avait-elle visitées ? Combien d'enseignants reçus ? Combien d'étudiants écoutés directement par Madame Abdul-Malak ? L'ANDEA c'est si pratique pour éteindre les revendication, n'est-ce pas Madame ?

Donc, tournons cette page catastrophique pour le Patrimoine et surtout pour celui qui nous intéresse ici : le Patrimoine Contemporain et Moderne. 

Madame Dati venant d'un milieu populaire, tout comme moi,( tout comme vous sans doute), sera sensible au regain d'intérêt pour le Patrimoine qu'elle a traversé dans sa vie et soyons certain qu'elle saura rendre hommage à cette période où la République offrait en grand nombre du Logement Social de qualité, dessiné par les plus grands architectes, soyons certain que Madame Dati sera sensible aussi au petit Patrimoine Populaire, celui reconnu justement par ceux qui le vivent, qui y ont accroché des souvenirs au fil de leur vie, croyant en l'élan républicain. Soyons certains que Madame Dati, Ministre de la Culture obligera enfin à ce que, hors de l'urgence d'une gestion catastrophique et catastrophé, les écritures architecturales les plus récentes entrent enfin dans une phase de reconnaissance parce qu'elles font partie intégrante de l'apprentissage de la France, d'un savoir être français : une église de béton en campagne, un Grand Ensemble singulier ou non, une piscine, une façade Art Déco, un Club des Jeunes ou, bien entendu, des oeuvres venant de nos plus grands architectes, ceux des Trente Glorieuses mais aussi, dès maintenant, nos architectes des années 80 et 90. Il est grand temps !

Après tout, ce Patrimoine fut souvent celui programmé et dessiné par ceux dont Madame Dati revendique l'héritage politique.

On rêve d'un beau et immense Dati Show du Patrimoine Moderne et Contemporain. On rêve que sa présence si disruptive oblige tout ce petit monde du Patrimoine à se remettre sur ses pieds, qu'elle bouscule l'ordre des choses, qu'elle traverse la question du Patrimoine en mettant son histoire personnelle au coeur des enjeux du devenir républicain de ce Patrimoine. Comment faire histoire de la France, Madame Dati  si on oublie aussi ce Patrimoine Populaire des Français ?

Nous comptons sur vous. Enfin...On attend avec impatience des signes. Faire de la politique c'est agir, agissez donc Madame. Bonne chance, bonne route. Faites-nous oublier les derniers mois.

Comme exemples et comme objets de réflexion, Madame Dati, je vous offre trois modèles à interroger, trois typologies à surveiller, trois espaces populaires de la France :



Nous sommes à Alès devant le très belle tour de la Cité de la Clavière gràace à une édition S.L. On aime tout dans cette image, l'architecture bien évidemment dont le dessin est spectaculaire et exemplaire du traitement heureux de ses faces mais on aime aussi le cliché parfait, presque troublant d'ordre et de beauté : comme une démonstration de force et de radicalité. C'est beau, justement parce que c'est implacable.


Et voici une petite chose, une belle église si typique de la production de cette période : Le Portel, église St-Pierre-St-Paul, par les architectes Laloy-Nedoechelle. La carte postale est une édition Yvon en Draeger ! Un must ! Comment ne pas être sensible à ce beau travail de façade, à la justesse simple des matériaux, au désir de faire une architecture abordable, honnête dans ses signes ?


Pour finir, voici une image. Une image d'une certaine France, celle justement qui pratique et invente aussi le Patrimoine. Celle qui s'en réjouit, qui le vit parfois avec le coeur, parfois avec aussi du doute. C'est de cette France-là dont je viens, cette France à laquelle il faudra aussi reconnaitre que son monde n'est pas fait que de rond-points comme des places publiques, que de jours où on se lève tôt. Cette France-là, Madame Dati, il faut en faire un acteur du Patrimoine, lui donner l'occasion de le définir mais aussi l'occasion de le connaître. J'habite une telle maison. J'habite cette France. Et c'est depuis ce type d'espace que je m'adresse à vous. C'est, depuis cet espace populaire que j'ai fait mon transfuge, comme, je l'imagine, vous avez fait le vôtre, Madame Dati.

Nous sommes à Orgerus, devant la Cité "Phénix"grâce aux éditions CAP. J'en reconnais tous les signes et tous les espoirs d'une vie meilleure.

lundi 1 janvier 2024

2023 la catastrophe permanente jusqu'en 2024


 
L'année s'achève donc et l'année patrimoniale 2023 fut, en tous points, catastrophique et je crains même prémonitoire de l'avenir au vu du peu d'intérêts des responsables politiques et officiels de ce patrimoine. À ce titre, le Ministère de la Culture et ceux en charge (c'est le mot) de ce Patrimoine Contemporain sont vraiment aux abonnés absents. 

Il faut dire que nous en avons l'habitude mais ce qui devient grave c'est que les outils de cette destruction presque maintenant systématique de ce Patrimoine (surtout dans le logement social) sont en place. 
Et aux politiques de gentrification déjà à l'oeuvre depuis au moins 15 ans maintenant s'associent celles de l'écologie et de la sécurité conjuguées dans d'étranges épousailles (le policier et l'écolo même combat) pour un futur fantasmé, un nettoyage par la verdure et l'épaississement des façades quand il ne s'agit pas, tout simplement d'éradiquer du bâti dans le geste le moins écologique qui soit...Détruire.
Détruire des bâtiments, des histoires.

Pour moi l'exemple archétypal de cette année 2023 est l'abattage de la Tour des Célibataires de Mourenx.
Voilà bien une oeuvre, voilà bien un signal urbain, voilà donc une écriture et un urbanisme reniés.Tour abattue dans une forme de morgue et même de jubilation insensée et spectaculaire. On aurait pu croire que cette tentation du spectacle de la destruction des constructions était un rien démodée mais non, subsiste donc cette volonté d'un spectacle politisé pour montrer de manière totémique comment des politiques urbaines s'arrogent des droits patrimoniaux. L'éradication d'un paysage, d'une histoire, d'un type urbain devrait toujours être interrogée. Mais qui a défendu cette forme et cette histoire à la DRAC ?
Qui pour y dénoncer au mieux ou au moins sa totale impuissance ?
Personne que je sache.

On verra sans doute la même bêtise à l'oeuvre à Pessac avec les Tours de Saige-Formanoir de Dubuisson dont il semble que personne au Ministère ne prenne la mesure de cette oeuvre, de ses qualités, de notre responsabilité générationnelle de maintenir cet héritage.
L'inculture massive des politiques associée à la couardise des responsables patrimoniaux (à moins que ce ne soit le contraire) laissent donc la place à une catastrophe annoncée en 2024 ?
Les Patios de Aillaud à Grigny, Toulouse-le Mirail, Tour INSEE, Chatenay-Malabry, Mourenx, Tours Saige-Formanoir  donc, le placage honteux des Tours Nuages de Aillaud à Nanterre etc etc...Combien encore à venir sans un regard, sans un peu de courage des autorités patrimoniales ministérielles pour les stopper, les dénoncer et entamer enfin un vrai combat pour un inventaire sérieux, une mise à plat de cet héritage. Assez de colloques ! De "missions" ! De réflexions, de tables rondes ! Assez ! Agissez maintenant. AGISSEZ !

Vous serez tenus responsables car vous êtes responsables de cette histoire qui s'écrit sous vos yeux.

Aucun espoir ? Bien entendu, il y a des exceptions. On voit sur le site du Ministère les agents faire la promotion de l'envie du Président de sauver nos églises de village ou de se satisfaire que la Mission Berne à grand coup de chèques spectaculaires qui viendraient guérir la plaie ouverte de la déserrance du Patrimoine... Oui, c'est déjà bien. On se réjouit bien entendu de la belle restauration du Palais des Congrès de Royan. Mais combien de catastrophes dans cette ville pour remuer un peu les autorités sur l'intérêt de son urbanisme ? Combien, partout, de petites pépites détruites, de cités martyrisées, de piscines Tournesol massacrées, de réhabilitations à la mode de l'ANRU ? Combien de Patrimoine méprisé par des petits barons locaux vendant leur Patrimoine pour ne pas "avoir à s'emmerder avec ça" ? Et, pourtant en France, on a des experts. Des architectes avec des Prix Internationaux, on a même et surtout le goût de l'Histoire...
Alors ? 
Rien. Vous verrez...rien ne changera car, c'est si facile de laisser faire, d'agir dans de petites marges glorifiantes et de briller sur quelques exceptions. 

En fait, il faudrait faire passer le monde du Patrimoine des exceptions à l'exceptionnalité. Reconnaître même les défauts de certains héritages comme nécessaire à l'Histoire. C'est typiquement le cas des Tours Nuages de Aillaud. On fait semblant d'être attentionnés alors que finalement, au vu du futur projet, il ne restera rien, absolument rien de ce qui en faisait la poésie. Ratage parfaitement orchestré avec tous les parapets possibles : de la pure communication politique. Et on trouve toujours des "artistes" pour croire qu'ils participent au sauvetage. Les pauvres...
Car le "remodelage", la ré-écriture, la transformation, voir même la réhabilitation quand ce n'est pas fait avec des pincettes et l'intelligence de grands architectes (qui pensent) c'est souvent bien pire que l'éradication. C'est pour ça qu'il faut se battre pour un état d'exceptionnalité totale de cet héritage.

Détruisons donc ces Tours Nuages ! Ayons pitié d'elles ! Tout sauf ce gainage de casserole en Inox !

Vous aurez remarqués si vous êtes des fidèles de ce blog, son ralentissement. C'est que, sans doute, je commence à avoir fait le tour de cette question de la représentation de l'Architecture des Trente Glorieuses par ce média populaire et, à part égrainer chacune des cités ou des bâtiments, je ne vois pas bien ce que je pourrais encore vous dire.
Ma dernière conférence à l'école des beaux-arts d'Angers a duré plus de deux heures, presque trois...c'est fatigant pour tout le monde. Fatigant aussi ce combat permanent pour des architectures mal aimées, surtout mal apprises, mal vues et instrumentalisées par les politiques pour nous raconter des idéologies. Fatigant que des chef-d'oeuvres soient ainsi massacrés, détruits, restylés sans réflexion, sans sens de l'Histoire. Je vous jure, c'est épuisant. J'ai un dernier combat sur le feu, celui de la Cité de Louis Miquel à Saint-Pierre-lès-Elbeuf...Et c'est mal parti...

Bonne année 2024 sur les ruines de l'Architecture Moderne et Contemporaine.
Je suis si fatigué d'être en colère.

Battez-vous ici :








samedi 9 décembre 2023

Non, Monsieur Hammache, le centre commercial de Claude Parent...

 ...à Ris-Orangis n'est pas classé au Titre des Monuments Historiques contrairement à ce que vous affirmez  dans un récent article du Journal des Arts !
Par contre, celui de Sens est bien inscrit.
Comme sur ce blog, bien entendu, nous savons quelque chose de ces deux dossiers de Ris-Orangis et de Sens et de son traitement catastrophique et honteux par la DRAC Ile-de-France pour celui de Ris-Orangis, je crois qu'il est nécessaire ici de rétablir la vérité.



J'ai donc, par courrier à sa rédaction, informé Mr Hammache de son erreur. Pour l'instant, mon courrier n'a pas du trouver Mr Hammache car je n'ai pas eu l'honneur d'une réponse.
Comme indiqué dans ce courrier, je n'en veux pas à ce journaliste dont je lis régulièrement les articles à mes étudiants. Au contraire, cette erreur est significative d'une permanence de ce dossier dans l'esprit des critiques d'architecture et certainement aussi dans celui des habitants et des spécialistes du Patrimoine. Il faut dire que sept années de travail ça marque forcément un peu les esprits. Et puis, cela montre aussi comment ce centre commercial de Ris-Orangis de Claude Parent est passé dans la mémoire des combats patrimoniaux et c'est déjà une victoire contre ceux qui s'y sont opposé. (suivez mon regard en fonction oblique)
Par contre, j'avoue ne pas bien comprendre comment une telle erreur peut passer dans un journal si sérieux. Tout le dossier de Ris-Orangis et son traitement ralenti (euphémisme) par la DRAC Ile-de-France sont disponibles ici-même sur ce blog...
À moins, (imaginez ça une minute !) à moins que le centre commercial soit bel et bien classé ! Ce serait une incroyable découverte !
À moins aussi que la DRAC Ile-de-France ait bien informé le journaliste de ce classement...ce serait une étrange conclusion !

On notera, et c'est assez amusant, que la photographie utilisée dans l'article de Sindbad Hammache reprend le point de vue sur le centre commercial publié dans le journal local lors de la demande de classement. Cela signifie sans doute que ce point de vue est bien celui qui représente le mieux ce lieu. 

Ci-dessous, le lien vers le blog  :