lundi 6 novembre 2017

Nanterre, tu meurs

Pourtant il fut un temps où la Mairie de Nanterre était fière de ses paysages, fière de son architecture contemporaine, fière de son urbanisme et même fière des aménagements des parcs. Tellement fière que la Ville de Nanterre par l'intermédiaire de son imprimerie municipale diffusait ça :


Dans le Parc, dans le gris-bleu d'un lac artificiel, les petits corps venaient se rafraîchir sans soucis des écrevisses, des alvins, des algues glissantes. Au loin, la famille pique-niquent sous l'ombre d'arbres adolescents indifférents à tant de proximité. La zone devient soudain verte déterminée par un entretien soigné d'une prairie offerte. Puis, surgissent les reines, les tours, celles qui donnent au ciel lui-même sa teinte comme si le magicien Fabio Rieti avait réussi pour la première fois à colorer l'azur, comme si l'élévation de ces totems assurait la météorologie.
Regardez comme cela se répond, comme cela se fond, comme cela est juste.
Vous voyez l'accord parfait des teintes. Qui croyez-vous qui tienne ça dans ses mains, dans notre œil ? Est-ce Monsieur Émile Aillaud qui ordonne ce monde ? Est-ce un peintre trouvant là la raison des leçons de la peinture de Poussin ? Est-ce Alphonse Allais voyant surpris la réalisation des villes à la campagne ? Est-ce Luis Pueller qui photographie ce moment ?
Ce qui est certain c'est qu'il s'agit non pas d'un ensemble de constructions mais d'une œuvre. Et que cette œuvre unique au monde, unique au monde, entendez-vous, est maintenant menacée par ceux-là même qui devraient la protéger, la défendre, et l'entretenir.
Rien ne pourra être comparable à cette exceptionnalité, rien ne pourra faire semblant d'y ressembler, rien, aussi minuscule que soit l'intervention ne pourra singer cette œuvre d'art. Il y a là une exceptionnalité première, la même que Talmont sur son promontoire, la même que les ors de Versailles, la même que les bétons de Freyssinnet. Il y a là, réveillez-vous, une œuvre pour laquelle nous n'avons aujourd'hui qu'un seul devoir : la protéger et la maintenir visible aux générations à venir. Les Tours-Nuages de Émile Aillaud ne nous appartiennent pas, n'appartiennent surtout pas à leur propriétaires, elle appartiennent à l'ensemble vivant de ceux qui regardent et savent jouir.
Jouir. Oui.
Une fois encore pourquoi ceux qui font métier de cette jouissance perpétuée n'ont rien fait ? N'ont pas signer les papiers ? N'ont pas communiqué, instruit les politiques ? N'ont pas alerté ? N'ont pas protégé ? Comment ils s'appellent déjà ceux-là ? Les agents du Patrimoine en Ile-de-France ? Les bailleurs sociaux aveuglés par les promesses d'une démagogie du bien faire, mêlant un asservissement aux réglementations à une incurie culturelle, croyant que c'est leur droit ? Comment une ville qui a porté un héritage du combat, une politique de recherches, des tentatives heureuses de vivre autrement, d'offrir à la vie la chance de se vivre vraiment, comment ceux-là même qui écrivent la poésie des ville peuvent maintenant abandonner ainsi ce qui constitue la chair de leur rue, de leur place, des histoires vécues là ?
Mais dans quel monde de merde vivons-nous ?
La faiblesse devient la norme, l'indifférence devient l'instrument, la lâcheté patrimoniale devient l'argument, la traitrise aux idéaux devient enfin à Nanterre le signe puissant de ce Monde retourné sur les valeurs des combats qui l'ont construite.
Nanterre, tu meurs.
Tu meurs et on te prépare pour étouffer les odeurs de ton cadavre pourrissant un linceul brodé des meilleurs intentions.
Nanterre, tu meurs.

Madame la Ministre de la Culture ? Madame Nyssen ? Pardon, Madame ?
Les architectes des Bâtiments de France ? Pardon ? Excusez. Vous êtes là ? Vous voyez ?
Monsieur le Maire ? Monsieur Jarry ? Y a quelqu'un ?
Monsieur Jean-Paul Ciret, adjoint à l'écologie urbaine et au Patrimoine Communal ? Vous êtes là ?
Monsieur le Conseiller Municipal Délégué à la Politique de la Ville ? Monsieur Iznasni ?
Monsieur Julien Sage, Adjoint chargé de l'Urbanisme ? Allez-vous laisser faire ?
Et vous Madame Boudjemaï ? Adjointe à la Culture ? Comment voyez-vous cette histoire de votre ville en train de disparaître ? En parlez-vous avec Monsieur le Maire, le matin, autour du café ? 

Et toi, citoyen, citoyenne qui lis ces lignes ? Tu as fait quoi aujourd'hui pour sauver ton Monde ?
C'est par ici que ça se passe.
SIGNE LA PÉTITION, MAINTENANT, LÀ, TOUT DE SUITE :
https://www.change.org/p/madame-la-ministre-de-la-culture-tours-nuages-de-nanterre-arr%C3%AAtons-le-massacre
Signe, diffuse, communique et n'oublie pas d'être exigeant avec ceux qui doivent porter la Culture, car c'est de TA Culture qu'il s'agit, pas de la leur.
Écoute Émile Aillaud ici :
http://archipostalecarte.blogspot.fr/2015/02/faire-un-non-33-tours-avec-emile-aillaud.html
Lis Richard Klein ici :
http://www.docomomo.fr/actualite/201709/tribune-tours-nuage-emile-aillaud-1902-1988
Exprime ton désarroi, ta colère :
http://archipostalecarte.blogspot.fr/2017/03/menace-sur-nanterre.html 

Et surtout, surtout, architecte, artiste, ne participe pas à cette mascarade de la requalification, ne sois pas complice. 
Et n'oublie pas qu'à Nanterre encore, une école d'architecture, l'une des plus belles, est en train de pourrir.

3 commentaires:

  1. LECLERCQ URBANISTE6 novembre 2017 à 18:28

    en 2006 et 2007 je bossais pour la ville d'Argenteuil...La Défense et Nanterre j'y allais souvent et quand je repartais des souterrains de la défense je longeais ces tours...systématiquement... j'en prenais plein les yeux, plein de joie ...

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  2. le paysagiste du parc Malraux est Jacques Sgard, qui aussi dessiné celui de mériadeck à bordeaux

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